Burkina-Faso : retour à un processus révolutionnaire inachevé

Dans le milieu des années 80, quatre jeunes officiers de l’armée voltaïque décident d’engager leur pays dans un processus révolutionnaire. Dans les casernes, ils s’imprègnent des écrits classiques en la matière, c’est-à-dire des thèses révolutionnaires de Karl Marx, Engels, Lénine,  Staline, Trotski et de bien d’autres. Ils ne manquent pas de s’inspirer de la lutte de révolutionnaires africains tels Kwamé  Nkrumah, Patrice Emery Lumumba, Ruben Um Nyobe, Félix Moumié, Nasser, ces révolutionnaires panafricanistes qui se sont ligués en leur temps contre le colonialisme, l’impérialisme et le néocolonialisme. Certains y ont sacrifié leurs vies.

 Ces quatre jeunes officiers ont pour noms : Sankara, Zongo, Lingani et Compaoré. Avant de passer de la théorie à la pratique, ils créent au sein même de l’armée voltaïque, fortement inféodée au néocolonialisme français, une cellule clandestine dénommée le « Regroupement des Officiers communistes (le Roc) – ce qui n’était très prudent de leur part à l’époque, le néocolonialisme français veillant au grain sur ses intérêts en Afrique et dans cette sous-région où Houphouët Boigny jouait le rôle de vigile- Ils sont passés à la pratique révolutionnaire dans un premier temps en 1983 en perpétrant un coup d’Etat, en prenant soin de placer en avant un officier de leur génération qui n’avait beaucoup de sympathie pour les thèses révolutionnaires qui étaient les leurs, le commandant Jean Baptiste Ouédraogo. Cela fit long feu. Premier ministre de ce dernier, Thomas Sankara fut vite neutralisé et mis aux arrêts. Ce qui suscita une vive réaction de la part de ses camarades du « ROC » qui, depuis la garnison de Pô à la tête de laquelle se trouvait Blaise Compaoré, firent une descente sur Ouagadougou, libérèrent Thomas Sankara et le placèrent à la tête de l’Etat.

Commença  alors un processus révolutionnaire qui suscita l’admiration du monde entier. La jeunesse africaine en fut très séduite. Des transformations radicales, politiques, économiques, sociales et culturelles eurent lieu en Haute Volta. Le pays changea de nom pour devenir le Burkina-Faso, la  « Patrie des hommes intègres ». Se sont mis à foisonner dans le pays, des groupuscules se réclamant tous du marxisme- léninisme, certains du Trotskisme, et parfois des thèses albanaises d’Enver Hodja et Ramiz Alia. Et ce qui devait arriver arriva, le gauchisme s’installa, et de fortes et belles manières. Ces groupuscules : L’Union des luttes communistes (ULC), « Union Des communistes Burkina-bê »(UCB) , Le Groupe des Communistes Burkina-bê (le GCB), l’ancien PAI (le Parti Africain  de l’Indépendance), le Parti communiste révolutionnaire de Haute Volta (le PCRV) se sont mis à se mener des guéguerres intestines et fratricides, lesquels affaiblissaient le processus révolutionnaire.

 L’impérialisme français en profita alors pour les infiltrer et les manipuler. Il réussit l’exploit d’éloigner idéologiquement Blaise Compaoré de ses autres camarades de lutte du « ROC » dont Thomas Sankara. Confiant en la bonne foi de son ami, Sankara ne s’en inquiéta pas. Quoi qu’alerté par certains de leurs amis communs, il demeura fidèle à leur amitié. Pendant ce temps, le valet de l’impérialisme dans la sous-région, Houphouët Boigny, continua à creuser le fossé entre les hommes, jusqu’à cette soirée du 17 octobre où tout bascula. Thomas Sankara fut froidement exécuté par un commando sur ordre de son ami de toujours. Et ce fut l’arrêt du processus révolutionnaire, au nom de la « rectification ». Le pouvoir du bourreau Blaise Compaoré dura une trentaine d’années.

C’est ce processus révolutionnaire que vient de reprendre le jeune capitaine Ibrahim Traoré. Depuis un certain, ce dernier fait lui face à des assauts guerriers de déstabilisation de son régime politique. Ces assauts viennent de toutes parts, notamment des djihadistes qui y ont trouvé un terreau fertile. Une fois de plus la Côte d’Ivoire d’Alassane Dramane Ouattara leur offre un terrain de repli ; Les attaques se multiplient et les tentatives de coups d’Etat sont devenues monnaie courante.

Il y a beaucoup de craintes que le processus ne soit de nouveau stoppé.

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