Peut-être vers une la résurrection du RSDG de 1990.

Les participants au Dialogue national inclusif ont recommandé que les partis politiques se réclament désormais des «  quatre grands courants idéologiques », sans préciser lesquels. C’était la condition exigée, par eux, de l’existence légale d’un parti politique en terre gabonaise. Une habile manière de ressusciter le RSDG de 1990 cher à Omar Bongo Ondimba et Paul Mba Abessole, et donc de restaurer le parti unique.

 Du coup, et dans la foulée, les activités des partis politiques existants, et déjà légalement reconnus, ont été mises en berne. Il avait même été dit que tous étaient suspendus. Plus particulièrement le Parti Démocratique Gabonais, dont l’annonce de suspension avait été suivie d’une salve d’applaudissements, accompagnés de plusieurs ouraaaah.

Qu’allait-on faire de ces partis existants, certains depuis 1990 ? Ils devaient attendre une nouvelle loi régissant la vie des partis politiques et se conformer aux nouveaux critères qu’elle contiendrait pour se donner une virginité dans un cadre légal, A-t-on[CM1]  répondu, tout en précisant que ces critères allaient être plus corsés qu’auparavant. Ladite loi allait donc avoir un effet rétroactif. Une première, depuis qu’existe le droit.

Puis  tout d’un coup, le PDG est sorti de son coma, assommé qu’il avait été le 30 août 2023 dernier par les militaires. Ce coma n’aurait duré qu’un an et le voilà en scène et en forme plus que par le passé. La courte période d’hibernation lui ayant permis à se donner plus d’énergie. Plus d’énergie, sans idéologie, ce parti créée par Albert Bernard Bongo en mars 1968 étant resté fidèle à l’axe que lui avait tracé son fondateur à savoir : « ni à gauche, ni à droite, toujours de l’avant », avec toujours un guide éclairé. Avant-hier c’était le « Grand Camarade Président fondateur », hier ce fut le « Distingué Camarade Président » et aujourd’hui c’est le CTRI, avec son chef Brice Clotaire Oligui Nguema.

S’étant inspiré, du point de vue organisationnel, des anciens partis communistes de l’Union des Républiques soviétiques et socialistes (URSS) et des pays de  l’Est européen, le Parti démocratique gabonais n’a jamais eu autre idéologie que celle- là. Et cela date depuis sa création en 1968, des ruines du Bloc Démocratique Gabonais de Léon Mba Minko m’Edan et de Paul Idjendjé Gondjout. Même si le BDG n’avait pas, lui aussi, d’idéologie marquée, son anticommunisme ne passait pas néanmoins inaperçu. A l’école, inspiré et façonné par les courants et les partis libéraux et conservateurs français, il ne pouvait en être autrement.

Aujourd’hui, en revenant en force sur la scène politique, personne n’a curieusement demandé à ses dirigeants, nouveaux et anciens, quelle est désormais son idéologie, en dehors de l’allégeance et du soutien au CTRI.

C’est donc dire à quel point nul, aucun dialogue faut-il inclusif, ne peut  imposer une idéologie à un parti politique, cette dernière (l’idéologie) dépendant des convictions et du parcours politique de celui ou de ceux qui le créée (nt), et même du contexte historique.

Il n’existe pas de ce fait « quatre grands courants idéologiques »,  comme l’ont prétendu les dialogueurs d’Angondjé.

Il existe le féodalisme, un courant qui prône la féodalité, c’est-à-dire l’existence des royaumes. Un tel courant existe en Europe où l’on trouve beaucoup de ces royaumes. En Angleterre, en Belgique et dans plusieurs pays Nord européens par exemple : Pays-Bas, Luxembourg, Danemark, Finlande, Suède, Autriche etc. On en trouve également en Asie et en Orient : Thaïlande, Japon par exemple et même en Afrique, où le Maroc en est un parfait exemple.

 Il s’était même manifesté en Afrique centrale dans les années 70, avec l’intronisation de l’ « empereur Bokassa Ier ».

Il existe également le libéralisme ou capitalisme, lequel  prévaut beaucoup plus dans plusieurs pays européens, nord-américains et asiatiques, avec des périphéries africaines et sud-américaines. C’est l’idéologie en vogue aux Etats-Unis d’Amérique par exemple, au Canada, au Japon. Ses théoriciens furent entre autres, Adam Smith,  Ricardo, Jean baptiste Say, Malthus, avant que ne naissent des théories néolibérales.

Féodalisme et libéralisme peuvent se combiner. Tel est le cas de certains pays suscités.

Il existe aussi le nazisme. C’est la forme la plus abjecte du libéralisme inventée par Adolf Hitler et à laquelle s’inspirent tous les partis d’extrême droite européens, avec une influence chez les communautés blanches ayant colonisé l’Amérique du Sud. Le Rassemblement National de la famille Lepen en est une des manifestations en France. Il en est du parti actuellement au pouvoir en Italie. La Hongrie d’Hector Orban rentre également dans ce chapitre. On  trouve également ce type de partis à idéologie nazie, raciste et xénophobe dans bien d’autres pays européens tels la Belgique, l’Espagne, l’Autriche, les Pays-Bas etc.

Puis, il y a la démocratie chrétienne, un courant libéral  puisant, lui, dans les valeurs de la culture et de la civilisation judéo-chrétiennes. Celles qui voudraient que chacun soit pour soi et Dieu pour tous. En quelque sorte l’individualisme, source du progrès de tout être humain.  Allié à l’église, les démocrates-chrétiens s’en sont éloignés progressivement. C’est l’un des courants idéologiques les plus anciens en Europe par exemple, où on retrouve des réminiscences en France, notamment.

Puis encore, il  y’ a l’anarchisme, ce courant idéologie qui exclut toute forme d’organisation et qui pensent que les êtres humains peuvent vivre dans la liberté absolue, sans Etat, sans nation et sans encadrement juridique, sans police, sans armée et sans aucune autre forme  de contrainte, la société se régulant d’elle-même. Ce courant idéologique a existé partout en Europe et continue d’exister y compris aux Etats-Unis d’Amérique. En Russie par exemple, il était porté par des personnes telles Bakounine.

L’apartheid a été également un courant idéologique basé sur la discrimination raciale, en prétextant la supériorité de la race blanche sur toutes les autres, notamment la noire. Les Boers, ces racistes blancs, ségrégationnistes venus d’Europe du nord l’ont appliqué pendant près d’un siècle en Afrique du Sud, le combinant avec le libéralisme économique.

Puis et enfin il y a le socialisme. Les premiers penseurs plus connus ayant mené des réflexions à ce sujet sont les français St Simon et Proudhon, puis l’Anglais Owen  qui, au vu des luttes menées par les ouvriers  constitués en syndicats, pour revendiquer les meilleures conditions de travail et de vie, en sont arrivés à prôner l’harmonie des classes sociales. Qualifiant cela d’utopique, Karl Marx et Engels, principalement, ont fait une analyse minutieuse,  rigoureuse, historique et dialectique de l’évolution des sociétés humaines, avant de décortiquer le fonctionnement du système capitaliste. Ils en sont arrivés à la conclusion selon laquelle seule la lutte entre forces antagonistes, la lutte des classes sociales, en est le moteur principal. D’où le concept de socialisme scientifique.

 Les premières révolutions survenues dans le monde, avec une transformation radicale de la société, s’en sont inspirées.  En Russie, Vladmir Illich Oulianov (Lénine) en fit une arme redoutable pour renverser l’ordre féodal tsariste (le marxisme-léninisme), avec effet de contagion dans les pays de l’Est européen et en Chine où Mao Ze Dong s’en servit également pour renverser, à son tour, l’ordre féodal dans son pays. Pour ne prendre ces deux exemples historiques.

 Dans des pays sous domination coloniale, des mouvements de libération et des partis politiques d’obédience marxiste-léniniste s’en servirent également pour s’affranchir du joug colonial.

 Pour ceux qui l’avaient conceptualisé, le socialisme est le premier stade d’évolution vers une société sans classes sociales, la société communiste.

Niant l’existence de la lutte des classes, d’autres variantes du socialisme ont vu le jour, prônant des réformes progressives du système capitalisme, sans procéder à une transformation radicale de la société, c’est-à-dire à la révolution. C’est le cas par exemple de la social-démocratie.

On comprend dès lors qu’il n’y a que « quatre grands courants idéologiques ». Ce n’est là qu’une méconnaissance des courants idéologiques ayant traversé le monde et qui continuent même à le façonner.

Et nul, redisons-le, ne peut forcer un parti politique  à entrer dans tel ou tel de ces courants idéologiques s’il n’en a pas la conviction.

 C’était-le, et une fois de plus, proposer une fausse solution pour résoudre un vrai problème, comme l’ont tenté de le faire Omar Bongo Ondimba et Paul Mba Abessole en 1990, en proposant l’émergence d’un Rassemblement Social-Démocrate Gabonais, sans s’assurer que tous ceux qui animent la vie politique nationale étaient des sociaux-démocrates. C’était une fausse solution destinée à  contourner la revendication de la restauration d’une démocratie multipartite dans le Pays.

 Les dialogueurs d’Angondjé ont voulu trouver une autre fausse solution à un autre problème, celui de la prolifération de groupuscules abusivement dénommés partis politiques au Gabon. Des groupuscules n’ayant aucune assise populaire ; aucun siège social ; sans moyens financiers et matériels, ce qui les pousse à se prostituer politiquement ; et encore moins une idéologie.

 La meilleure manière de réduire leur nombre n’est certainement pas de les forcer à adopter une idéologie sans en être convaincus, mais plutôt de les pousser à affronter le verdict des urnes. Et progressivement, ils disparaitront d’eux-mêmes.


 [CM1]

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