Les 1300 familles habitant le quartier Plaine Orety de Libreville sont –ils tous devenus des délinquants de grand chemin, des hors-loi pour où l’Etat a décidé de les assigner à comparaitre au Tribunal de première instance de Libreville pour on ne sait quel délit commis ?
Dans la convocation d’assignation devant le tribunal de première instance de Libreville qui leur a été remise chacun à mains propres par les huissiers du cabinet Maître Moubelet, au domicile de leur chef de quartier, Michel Gesmer Ondo Obiang, à la requête du Cabinet du Ministre de l’Habitat, de l’Urbanisme et du Cadastre le vendredi 23 août 2023 qui avait saisi le Président du tribunal judiciaire de Libreville, l’objet est : « Jugement d’expulsion et de destruction ». On peut y lire : « Monsieur le Président, en exécution des très hautes instructions de Monsieur le Président de la Transition, Président de ,la République, chef de l’Etat relatives à la mise en œuvre du projet de construction d’une cité administrative, j’ai l’honneur de solliciter le rendu d’un jugement permettant à l’Etat de proc »der à l’expulsion des personnes et la destruction des biens se situant dans l’emprise du projet, en application des dispositions de la loi n0 6/ 61 du 1à mai 1961 règlementant pour cause d’utilité publique et instituant des servitudes pour l’exécution des travaux publics, pour une une population estimée à mille cinquante-trois (1053) ménages et mille cent cinquante-quatre ( 1154) constructions sans titres de propriété ».
Quel est le contenu de cette loi n0 6/61 qui date de mai 1961 ? Les populations qui habitent la zone impactée ne le savent, tout comme elles ne savent quel sort va leur être réservé. Certaines familles y sont installées bien avant l’accession du Gabon à la souveraineté internationale. Elles y ont investi, même sans titres de propriété. Tel es d’ailleurs le cas des habitants de tous les quartiers dits sous-intégrés de la capitale gabonaise.
La zone de Plaine 0rety est convoitée par des spéculateurs immobiliers, sous couvert de l’Etat Gabonais ; depuis plusieurs années. Depuis même l’époque de feu Omar Bongo Ondimba. Plusieurs fois les habitations ont été recensées et répertoriées .En témoignent, plusieurs numéros que l’on peut observer sur les façades desdites habitations : Zadra, CA et consorts.
L’Etat manquant de bâtiments pour loger son administration, dont plusieurs ministères qui squattent des immeubles privés, l’idée est venue à ces spéculateurs immobiliers de lui proposer des offres de construction d’une cité administrative, en contrepartie d’un contrat de bail de plusieurs années, une trentaine d’années par exemple.
Avec l’avènement d’Ali Bongo Ondimba à la magistrature suprême, les mêmes spéculateurs immobiliers sont venus à la charge, et cela n’a pas prospéré. L’arrivée du CTRI aux affaires leur a donné un nouveau souffle, et ce fut presque le harcèlement. Et les militaires ont prêté une oreille attentive à leur sollicitation. D’où la situation vécue actuellement par les populations habitant le quartier Plaine Orety, menacées qu’elles sont d’expulsion et de destruction de biens tels de vulgaires voyous, bandits de grand chemin. Elles sont assignées devant le Tribunal de première instance de Libreville, sans ménagement et avec un ton autoritaire.
Est-ce cela « redonner sa dignité au peuple gabonais », s’interroge-t-on, le ton amer à Plaine Orety. Les politiques de logement et d’habitat menées par les gouvernements successifs en 64 années d’indépendance formelle du pays ont confiné une écrasante majorité de Gabonais vivant dans les milieux urbains dans des espèces de ghettos, sans plan cadastrale où ils s’entassent dans ces bidonvilles où ils cohabitent avec des rats, des cafards, des moustiques et autres dangereux reptiles, ce à la merci de nombreuses maladies épidémiques. L’exode rural a multiplié à la vitesse exponentielle ces zones insalubres sans foi ni loi. L’insécurité y est larvaire. Des bandes de nervis y sèment quotidiennement la terreur. Plaine Orety est justement une de ces zones. Les populations qui y habitent méritent mieux que ces injonctions de leur expulsion et de destruction de leurs biens par les pouvoirs publics.
Le principe de la déclaration d’utilité publique d’une zone est certes inattaquable, les populations ne pouvant défier et affronter l’Etat. Cependant, cela doit se faire en respectant la dignité humaine, ce qui semblait être l’un des engagements pris par le Général Brice Clotaire Oligui Nguema. Mettre mille treize (1013) ménages dans la rue sans ménagement et surtout sans mesures d’accompagnement, est-ce là une manière d’honorer cet engagement.
Curieusement, face à une telle menace, les organisations des droits de l’homme et de défense de la dignité humaine se taisent. Normal, certains de leurs leaders très en verve à l’époque du régime déchu ont la bouche pleine et s’engraissent dans les différents organes de la Transition.