La Transition rattrapée par les réalités politiques, financières et socio-économiques

La Transition rattrapée par les réalités politiques, financières et socio-économiques

Alarmants les chiffres livrés ces derniers temps par plusieurs, et sérieuses, sources à propos de la situation économique et financière du Gabon. Des chiffres qui viennent doucher l’euphorie et la liesse populaire actuelle d’une Transition  pleine d’incertitudes au triple plan  politique, économique et social.

Au plan politique, par exemple, beaucoup d’interrogations fusent. D’abord par rapport à la durée de ladite Transition. Elle prendra combien de temps, au regard du vaste chantier des réformes à mettre en œuvre ? S’il ne s’agissait que de la « restauration des institutions », tel que cela avait été annoncé dès le début, elle pouvait durer même six(6) mois, et l’on allait aux élections.

 Seulement voilà, lors du Dialogue National Inclusif- Exclusif d’Angondjé, les participants  ont décidé de refaire la roue, en se donnant la grande ambition de trouver des solutions à tous les problèmes qui se posent au Gabon depuis qu’il est formellement indépendant, et même avant. Un travail titanesque que nul ne peut exécuter en moins de deux(2) ans.

 Aujourd’hui, à un mois dudit Dialogue, l’on a l’impression que le train est loin d’être mis sur les rails, et que l’on s’embourbe. Entre la réforme des institutions, ce qui impose l’élaboration et l’adoption de plusieurs textes législatifs, et l’empressement de vouloir respecter les délais annoncés, en commençant par l’organisation d’un référendum d’adoption d’une nouvelle loi fondamentale, on se perd en conjectures. Et des incertitudes planent. Du coup, d’aucuns n’hésitent plus à se référer au schéma du Mali, où la transition a été prorogée de cinq (5) ans. Presqu’un mandat présidentiel.

Sur les plans économique et social, le Fonds Monétaire International, l’Agence Moody’s et autres ; toutes ces institutions financières internationales se disent inquiètes des perspectives économiques et financières du Gabon.

Dans son rapport du 24 mai 2024, dont nous avions déjà fait état dans notre précédente édition, et si l’on s’en tient au point de presse de son Représentant au Gabon, tenu le 10 juin dernier, les finances publiques gabonaises étaient déjà  dans un état catastrophique au soir du 30 août 2023- date de l’arrivée des militaires au pouvoir- avec une dette publique de près de sept- mille cinq cent (75OO) milliards de Francs CFA et un taux d’endettement de 70.5 0/0 du Produit Intérieur Brut (PIB). Un taux  supérieur au plafond autorisé per les critères de convergence de la CEMAC (70  0/0) et qui montera en 2025 à 78.9 0/0 du PIB.

 Pire, le service annuel de la dette, en 2024, est de mille trois cent (1300) milliards à rembourser, soit trois cent (300) milliards de charges financières (intérêts) et mille(1000) milliards d’amortissement du capital à payer aux créanciers du Gabon. A cela s’ajoute un déficit budgétaire de 4.2 0/0 avant le coup d’Etat militaire, qui est passé à 6.4 0/0 du PIB en 2024.

 Ce qui veut dire que les dépenses de l’Etat sont progressivement supérieures aux recettes propres. Précisons que le plafond autorisé par la CEMAC est de 3. 0/0 (trois pour cent du PIB).

Du pouvoir d’ALI Bongo jusqu’à ce jour, il y a donc  manifestement un manque d’orthodoxie financière dans la gestion de l’Etat. C’est ce qui explique tous ces déséquilibres budgétaires. Un Etat ne peut dépenser plus qu’il ne gagne.

 L’attribution des marchés publics de gré à gré, aux copains et coquins (les ¾), sans appels d’offres ; l’ignorance des procédures dans le règlement des factures de l’Etat ; l’absence de programmation des dépenses ; la priorité donnée aux dépenses hors budget, en lieu et place de celles approuvées par le Parlement de Transition ; le train de vie princier fait de primes, de frais de missions et de voitures de luxe de fonction ; toutes ces pratiques peu orthodoxes ont toujours cours et plombent inévitablement les finances publiques.

Le FMI est par conséquent sans complaisance dans son analyse diagnostic fait à la demande des autorités de transition : le Gabon va tout droit dans le mur, si le laxisme budgétaire, la mauvaise gouvernance économique et financière et le manque de transparence sur les revenus pétroliers (circuit de la COC) et miniers ne prennent fin. L’agence Moody’s a enfoncé le clou : le Gabon court le risque d’une crise de liquidité à court terme. Ce qui est un euphémisme pour parler d’une cessation de paiement.

Quid alors de toutes ces promesses faites en termes d’infrastructures et autres projets ? Il semble que le Ministre de l’économie et des participations- ex-chef de caisse d’un super- marché Carrefour en France-à vendre à la plus haute autorité de la Transition de faire comme Ali en poursuivant la politique  de financement du Plan National du Développement de la Transition par le surendettement auprès  des marchés financiers aux taux d’intérêts de 7.0/0 à 9.0/0 avec des conditions prohibitives jusqu’à ce que le Gabon soit incapable d’honorer sa signature. Certainement qu’il ne sait pas, May’s Mouissi, que l’on finance un tel plan par la hausse des recettes fiscales, l’endettement et la planche à billets (compétence de de la BEAC et des 6 Etats de la CEMAC. Toutes options impossibles dans la situation actuelle du Gabon.

Les experts de Bretton- Woods prévoient un taux de croissance annuel du PIB en dessous de 3.0/0, soit presqu’au niveau de la croissance démographique annuelle, cependant que le taux de chômage des jeunes est de 40.0/0.

Il devient alors inévitable que la pauvreté et la chute des revenus par habitant vont se poursuivre dans les années à venir.

 


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