Aux yeux d’une partie de la communauté internationale, le Gabon vient de livrer le meilleur exemple de sortie d’une transition politique en organisant une élection présidentielle dont la transparence ne peut être contestée. Tout aurait été clair comme l’eau de roche. Les observateurs en veulent pour preuves : le fait que les électeurs aient accompli leur devoir civique dans le calme et la sérénité ; que le dépouillement des urnes ait été public ; que les procès- verbaux des différents bureaux de vote aient été instantanément affichés ; que les résultats aient été annoncés vingt –quatre (24) heures après la fermeture des bureaux de vote et surtout qu’il n’ait pas eu contestation après l’annonce desdits résultats par le Ministre de l’Intérieur.
Ces seuls faits suffisent pour attester que l’élection présidentielle gabonaise du 1 2 avril 2025 s’est déroulée dans la stricte transparence, presque dans les règles de l’art.
Quid alors de tout ce qui s’est passé en amont, c’est-à-dire avant que l’on en arrive là ? Aucun observateur ne fait relever que le Président de la Transition, qui avait promis rendre le pouvoir à un civil à l’issue de ladite transition, s’était en même temps taillé un costume sur mesures, non seulement en éliminant préalablement de la compétition électorale tous ceux qui l’auraient accompagné tout au long du processus, mais aussi en privant de leurs droits civiques d’autres citoyens Gabonais qui auraient pu, eux aussi, prendre part à la compétition, en les en écartant en raison des origines de l’un de leurs parents, de leur statut matrimonial, de leur état physique, du nombre d’années passées dans un pays étranger, de la fonction occupée jadis par l’un de leurs géniteurs. Ainsi fait, un large boulevard s’était ouvert sous ses pieds.
Puis, et en dépit de toute opposition, il a confié la gestion et l’organisation des élections à son propre ministre de l’Intérieur en en faisant juge et partie. Tout en étant personnellement à la manœuvre à Libreville, c’est son administration et les démembrements locaux de son département ministériel qui se déployaient et agissaient en maîtres absolus sur toute l’étendue du territoire national, en assiégeant et en dictant leur au niveau des différentes commissions électorales mises en place. Dans les bureaux de vote, les représentants des candidats n’avaient aucun mot à dire, ils ne faisaient que de la simple figuration.
Dans ces bureaux de vote, les mains libres et sans un seul œil indiscret, tout ce beau mondes sous de la tutelle du Ministre de l’intérieur, t les bureaux de vote imposés se sont alors adonnés allégrement au bourrage des urnes. C’est ainsi de nombreux bleds de l’intérieur du pays ont vu grossir vertigineusement leurs nombres de votants. Dans un village d’une vingtaine d’habitants par exemple, les suffrages exprimés à la faveur du candidat du CTRI-PDG ont parfois quintuplé, sans qu’il ait eu, comme d’habitude transport des électeurs. Dans le Département du Woleu, où l’on est fier de s’être substitué au Haut, en se disant avoir enfin un fils à la tête du pays, le scandale dépassait tout entendement. Les taux de participation dépassaient les 150.0/0, les urnes étaient pleines à craquer. Les cartes de vote empilées trainaient dans les bureaux de vote, nonobstant ce que dit la loi, il ne restait plus qu’à les glisser en piles dans les urnes. Un haut cadre de l’aristocratie altogovéenne, du côté d’AKanda, a même acheté des centaines de cartes d »électeurs, moyennant la somme de cent –mille (100.000) francs CFA
Et voilà donc qui a donné les résultats connus, 90,35 0/0 de suffrages exprimés à la faveur du candidat Brice Clotaire Oligui Nguema, un score dit à la soviétique. Beaucoup en sont fiers, y compris ceux-là qui, hier, exigeaient que les élections soient organisées au Gabon, dans une « transparence absolue ». Biberon à la bouche, cela ne les préoccupe plus. Ils ne se rendent même pas compte de ce fait grotesque par lequel le ministre de l’intérieur a rendu public un total de pourcentages des huit candidats en lice en dessous de 100 0/0, ce qui fait un gap de 4,8 0/0. Toute chose qui devrait logiquement décrédibiliser[CM1] les résultats annoncés et monter qu’il y a eu tricherie à grande échelle.
Les électeurs gabonais, depuis 1991, ont toujours voté dans le calme et la sérénité. Rarement il y a eu des incidents le jour du scrutin. Ils sont souvent rentrés chez eux en attendant que leur choix respecté. L’épicentre des récurrentes crises postélectorales a toujours été localisé à l’Avenue de Cointet, Siège du Ministère de l’Intérieur. C’est en ce lieu que le défunt Antoine Dépadoue Mboumbou Miyakou a agi en 1993, en proclament des résultats favorables au candidat Omar Bongo, alors que le dépouillement des urnes se poursuivait au niveau de plusieurs centres de vote de Libreville. C’est de là qu’était parti également Jean François Ndoungou en 2009 pour aller inverser les chiffres qui donnaient le candidat Ali Bongo Ondimba vainqueur au détriment d’André Mba Obame. C’est toujours de ce lieu que Pacôme Moubelet est parti en 2016 pour aller imposer ses propres chiffres à la CENAP que présidait René Aboghe Ella, avant de se rendre dans un blindé de l’armée, annoncer Ali Bongo Ondimba vainqueur, cette fois-ci au détriment de Jean Ping.
C’est encore et toujours de là qu’Herman Immongault vient de se fourvoyer dans la précipitation et l’empressement en procédant à une alchimie qui lui a permis de livrer à l’opinion des chiffres au-delà de toute logique arithmétique.
Comme quoi, en matière d’organisation des élections, on n’est guère sorti de l’auberge au Gabon. Tout au contraire , on s’y enferme même