Peut-on rendre à l’homme gabonais sa dignité en le torturant dans d’obscures cellules des forces de Défense et de Sécurité ? Les Gabonais se posent cette question dès les premières semaines de la Transition. A peine le couvre-feu avait-il été annoncé qu’un jeune homme fut assassiné par des hommes en treillis dans les environs des Jardins de la Peyrie, du côté du quartier dit « Venez-voir ». Un communiqué fut pondu par les autorités militaires, puis plus rien. Les conditions de cet ignoble assassinat n’ont jamais été élucidées. Nul ne sait aujourd’hui où en est l’enquête, les parents n’ont pas encore fait leur deuil et attendent.
Pour les Forces de défense et de sécurité gabonaises qui venaient de s’emparer des leviers de l’Etat, ce fut la meilleure façon l’Etat de droit dont avaient tant besoin les populations et par conséquent de redonner sa dignité à l’homme gabonais, cependant que pour la famille endeuillée s’annonçait une série noire
Alors qu’une nouvelle constitution vient d’être adoptée dans le pays, après qu’il a été, dit-on, « libéré », et que l’article 17 de ladite constitution énonce : « tout citoyen a le droit d’aller et venir librement à l’intérieur du territoire de la république gabonaise, d’en sortir et d’y revenir, le droit de fixer librement son domicile et sa résidence en un lieu quelconque du territoire national et le droit de bénéficier de la protection et de l’assistance de l’Etat s’il réside ou séjourne à l’étranger », voilà qu’un couvre-feu a été maintenu sans la moindre explication. Ce qui permis à certains hommes en treillis de se défouler avec zèle sur de paisibles citoyens sous prétexte qu’ils auraient violé l’heure prévue de début dudit couvre- feu. Au lieu de les maintenir sur place comme cela avait été dit, on les a chargés dans des Berlier pour aller leur faire subir de pires humiliations. Les images diffusées à travers des réseaux sociaux parlent d’elles- mêmes. Des images indignes d’un pays que l’on dit « libéré » de la dictature. Comme quoi, une dictature peut cacher une autre !
Et comme si cela ne suffisait pas, voici survenu un autre meurtre suite à des tortures, celui de l’officier Johan Bounda, le 21 décembre dernier dans les geôles de la Contre-ingérences militaire, plus connue sous le nom de B2. Pourquoi et dans quelles circonstances est mort ce jeune officier ? L’opinion attend les conclusions d’une enquête ouverte tardivement et annoncée par les autorités militaires, alors que les réseaux sociaux s’étaient déjà emparés de ce scandale.
Un de plus qui arrache la vie à une jeune gabonais, dans la fleur de l’âge. Du côté de la grande muette, cela commence à fuiter. Des noms sont cités. Deux Généraux sont indexés. Des lieutenants et autres sous-officiers sont cités et dit-on interpellés. Ne pouvant être juge et partie l’enquête ; informe –t-on a été retirée à la Contre-ingérence militaire et confiée à la Direction Générale des Recherches et la Direction Générale des Services Spéciaux. Et cela sent le roussi du côté de la grande muette qui se croyait déjà tout permis, immunisée d’avoir « libéré » le Gabon et d’avoir bénéficier de ce fait d’une amnistie. Curieux non !
Dans la sagesse des peuples des forêts et des savanes, il est dit quiconque voudrait savoir dans quelle position se couche l’antilope en brousse, il n’y a qu’à observer la position du mouton dans la bassecour. Les faits ci-dessus relatés n’annonce rien de rassurant pour l’avenir si jamais les militaires se maintiennent au pouvoir au-delà de la Transition.