En violation flagrante des libertés publiques reconnues par la Constitution à tous les citoyens gabonais, dont celle d’aller et venir sur toute l’étendue du territoire national, un couvre- feu a été décrété dans la nuit du 30 août 2023.
Cela se comprenait, le coup d’Etat militaire venait encore d’être perpétré et ses auteurs avaient toutes les raisons de craindre qu’il ait un contrecoup. Au fil du temps, cette restriction des libertés publiques ne se justifiait plus. Ce d’autant plus que l’on disait le pays « libéré », les forces de l’ordre ancien qui avaient été écartées du pouvoir et éloignées de leurs rentes étant revenues, et de fortes et belles manières, aux affaires. Et au premier rang ! La « libération » dont on parle a donc été du pain béni pour elles, et non pour le reste de la population qui, avec le couvre-feu a vu se dégrader progressivement leurs conditions de vie. Si certains barons du PDG, ancien et nouveau, ont été réhabilités et ont retrouvé leurs privilèges et leur luxe d’antan, de nombreux Gabonais qui vivent de la débrouillardise ont continué, eux, à tirer le diable par la queue.
Privées de la liberté de se mouvoir sur toute l’étendue du territoire national, les opérateurs économiques, par exemple, se sont retrouvés complétement asphyxiés. Il existe dans le pays, tout un pan d’économie de nuit. Il s’agit des tenanciers de bars et de bistrots, de boîtes de nuit, des braiseurs de poissons ou de viande, de propriétaires et de conducteurs de taxis et de bien d’autres métiers qui ne peuvent s’exercer rien qu’au-delà de 18 heures.
Tout ce monde, y compris les jouisseurs de nuit a donc été obligé de braver l’interdit, à leurs risques et périls. D’où les évènements survenus dans la nuit du 13 au 14 décembre 2024. Les images, devenues virales sur les réseaux sociaux, ont fait le tour du monde. Des pères et mères de famille humiliés, traités des conditions inhumaines, quand bien même ils n’auraient commis aucun crimes si ce n’est jouir de la liberté que leur reconnait la loi fondamentale du pays, même si cela se passe pendant une période dite d’exception.
Une telle période autorise-t-elle d’humilier les citoyens sans que ce qui leur est reproché soit judiciairement encadré. Depuis qu’il a été décrété, et cela fait 15 mois, le couvre- feu dont il est question n’est encadré par aucune loi. De plus n’avait-il dit que ceux qui le bravaient devaient être retenus sur place en attendant l’heure de son expiration et non interpellés et scalpés sans aucune précaution d’hygiène et de santé ? Des méthodes indignes d’un Etat de droit démocratique !
Quoiqu’il soit, il a été levé, ce couvre- feu, même si c’est jusqu’à « nouvel ordre ». Et les Gabonais respirent enfin l’air frais et jouir de leur liberté d’aller et venir sur toute l’étendue du territoire national. Encore que la mesure semble relever d’une manœuvre politique destinée à déjouer les intentions de certaines forces politiques qui s’apprêtaient, dit-on, à monter au créneau pour dénoncer cette restriction des libertés qui s’accompagne d’exactions et de violations des droits de l’homme.