Quand est-ce qu’elle prendra fin, la période de Transition instaurée au Gabon dès l’annonce du coup d’Etat militaire du 30 août 2023, et dans quelles conditions ?
En d’autres termes, quel est le calendrier électoral de sortie de crise ? L’opinion nationale et la communauté internationale ne sont-elles pas en droit de le savoir ?
Autre question liée aux deux autres ci-dessus :doit-on commencer par l’élection présidentielle, ou alors par les locales, puis les législatives, avant d’arriver à cette présidentielle ?
Des questions lancinantes. D’elles dépendent la solidité des institutions qui vont être mises en place après la Transition, ainsi que la stabilité politique, économique et sociale du pays. Beaucoup d’observateurs de la vie politique gabonaise se les posent, surtout les investisseurs extérieurs et autres partenaires au développement, lesquels freinent et traînent le pas, hésitant de venir investir, pour le moment, dans un pays aux lendemains incertains.
Et on peut les comprendre !
Apparemment, l’on s’achemine vers la tenue d’une élection présidentielle le plus tôt possible, histoire de couper de l’herbe sous les pieds à tout candidat qui aurait l’ambition de vouloir affronter celui qu’investirait le CTRI. La stratégie semble être celle de prendre tout le monde de vitesse, ou à contre- pieds.
Avec une telle stratégie, les adeptes du CTRI donnent l’impression d’être convaincus que c’est leur candidat qui l’emporterait au premier tour du scrutin, et que les carottes seraient cuites pour tout autre aventurier.
Hypothèse fondée sur le fait que ce potentiel candidat, au portrait bien connu, aurait le vent en poupe en ce moment. Ce qui ne parait pas d’ailleurs être le cas, au regard des résultats de la dernière campagne électorale référendaire, lesquels font apparaitre des incongruités çà et là sur l’ensemble du territoire national. Le match n’est donc pas gagné d’avance
Qu’à cela ne tienne. Admettons que cette hypothèse soit la bonne, celle de l’élection d’un candidat investi par le CTRI et ses satellites. Quid alors des autres institutions de la Transition qui, elles, n’auraient pas encore été renouvelées ? Jusqu’à quelle date fonctionneront-elles. Dans la crainte de ne pas disposer d’une majorité parlementaire, ce Président élu issu des rangs du CTRI n’aurait-il pas la génieuse et généreuse idée de proroger indéfiniment leur mandat, étant donné que c’est lui qui les aurait nommées ? Quel contrepoids pourrait alors constituer un parlement godillot qui n’obéirait qu’aux ordres du prince ? Et la Transition s’installera at. vitam aeternam.
Pour des raisons à peu près similaires, des pays de l’Afrique de l’Ouest où des coups d’Etat militaires ont également été perpétrés, vivent aujourd’hui ce type de situation, avec des périodes de transition indéfiniment prorogées. Nous pensons notamment au Mali et à la Guinée-Conakry. Nul ne sait, de par les temps qui courent, quand est-ce que auront lieu les élections dans ces pays. Encore que dans le cas du Mali, il s’agit d’un pays en guerre et les militaires en profitent pour s’éterniser au pouvoir, en s’abritant derrière l’argument sécuritaire.
Prenons maintenant une autre hypothèse, celle de l’élection d’un autre candidat autre celui investi par le CTRI et son allié PDG. Avec quel parlement ce dernier va-t-il gouverner le pays, si les deux chambres des deux hémicycles, Assemblée nationale et Sénat, ne sont pas renouvelées avant l’élection présidentielle ? Ce sera, que l’on le veuille ou non, avec les institutions de la Transition, nommées par le CTRI et son chef.
Imaginez la suite, le pays court le risque de vivre une paralysie du fonctionnement de l’Etat. Et la situation économique et financière, déjà détériorée aujourd’hui, se dégradera de plus en plus.
Ce débat portant sur le calendrier des élections de sortie de Transition est donc d’une importance capitale. L’esquiver, comme semble le faire le CTRI, c’est œuvrer pour une probable instabilité politique et sociale du pays, deux ans après un coup d’Etat militaire dont le principal leitmotiv a été la « restauration des institutions », afin que s’installe dans la durée un Etat de droit démocratique au Gabon.
Pour faire l’économie d’une telle instabilité, d’aucuns préconisent de commencer par les élections locales, puis les législatives, et enfin la présidentielle.
La rivière avait emprunté une trajectoire sinueuse, jalonnée de méandres, faute de conseils.