Ce qui s’est passé au Gabon le 30 août 2023 est historique. C’est la première fois, dans l’histoire des coups d’Etat militaires ou de renversement d’un régime politique par une insurrection populaire, que ceux qui venaient d’être déchus du pouvoir le retrouvent aussitôt, et dans le même élan.
En Afrique, en Amérique du Sud et en Asie, cela s’est rarement, ou presque pas, produit. Les enseignants de sciences politiques se référeront certainement au cas du Gabon pour former et édifier leurs étudiants. Il y a eu çà et là des révolutions de palais, mais le cas du Gabon est exceptionnel et mérite d’entrer dans les annales des sciences politiques. Presque du jamais vu et du jamais vécu. Curieusement, ceux qui se prennent pour des « Politis » n’en parlent pas, calfeutrés qu’ils sont dans des cabinets ministériels et des institutions de la Transition. Vous avez dit des intellectuels !
Au départ, il y a eu une élection présidentielle. Le pouvoir en place tenait absolument à la gagner, malgré le bilan désastreux des quatorze (14) années de magistère de son candidat et en dépit de son état de santé et même mental. Pour y arriver, des sommes d’argent colossales furent mobilisées. Des subterfuges et autres supercheries auxquels ont eu recours ses partisans trouvés.
Bien malheureusement, ce fut peine perdue. Le désamour entre ce dernier et le peuple était tel qu’aucune victoire dans les urnes n’était possible. Il en avait d’ailleurs été ainsi dans le passé. Seule l’armée, plus précisément la Garde républicaine, parvenait à l’imposer à la tête de l’Etat, au prix du sang des Gabonais, et en contrepartie de plusieurs types de marchandage.
Dans la nuit du 29 au 3à août 2023, la donne avait changé. Non seulement les marchandages au haut sommet de l’Etat n’ont pas prospéré, selon certaines sources très proches de ces milieux, mais aussi et surtout, un fait inattendu était en train de survenir, la victoire d’un certain Albert Ondo Ossa se dessinait.
Dans les différentes sphères du pouvoir, nul n’avait prévu cette victoire de ce fils Fang du nord du Gabon, à l’issue de l’élection présidentielle qui était en cours. Même les instituts de sondages les plus sérieux ne l’auraient prévu, tant l’homme était sans parti politique et donc sans d’importantes ressources humaines, et il ne disposait pas non plus de trésor de guerre, l’argent. En tout cas pas autant que son challenger d’en face.
C’est donc cette nouvelle situation qui a obligé les militaires à entrer par effraction dans l’arène politique. Et ce fut le coup d’Etat. Pour le justifier, ses auteurs prétendirent que les résultats de l’élection présidentielle avaient été « tronqués ». Alibi certes recevable et même valable. Ce qui laissait supposer qu’ils étaient en possession des vrais résultats.
Seulement voilà, jusqu’à ce jour ces résultats n’ont jamais été rendus publics pour que l’opinion sache qui a réellement et véritablement gagné le scrutin présidentiel du 27 août 2023. Nul n’en parle plus, même pas les membres de la « Plateforme Alternance 2023 » dont Albert Ondo Ossa était le candidat. C’est motus et bouche cousue.
Ce d’autant plus que les rendre publics exigerait que le véritable vainqueur soit connu et investi aux fonctions de président de la république, chef de l’Etat, élu par les Gabonais. Apparemment, c’est ce que craignent les militaires et les lobbies ethniques qui sont derrière eux.
Et voilà qui donne libre cours à toutes les interprétations des évènements survenus au Gabon dans la nuit du 30 août 2023. La thèse d’une révolution de palais, doublée d’une restauration de l’ordre ancien est la plus soutenue. D’aucuns n’hésitent pas également d’évoquer celle d’une digue ethnique qui aurait empêché Albert Ondo Ossa de s’emparer des leviers de l’Etat, en se référant au fameux »Tout sauf les fang » de l’année 2009.
Dans tous les cas, le fait que le Parti Démocratique Gabonais, que tout le monde pensait avoir été déchu du pouvoir par les militaires n’en soit pas écarté, et ce dès le premier jour, le retour aux premières loges de la vie politique nationale de ses caciques qui étaient allés se recycler dans l’opposition, l’alliance naturelle actuelle entre les partis politiques que ces derniers y ont créée et le PDG, pour faire triompher la cause du « OUI » au référendum du 16 novembre prochain ; tout ceci milite à la faveur d’un « coup de la restauration » et non de la « libération ».