Le 30 août 2023, de par la volonté des militaires qui venaient de perpétrer un coup d’Etat, s’est ouverte une période de transition dont nul ne sait jusqu’à ce jour quand est-ce qu’elle s’achèvera. Deux ans, comme cela avait été officiellement promis ? Peut-être trois ou plus. Ce d’autant plus que le chantier reste vaste et les problèmes à résoudre nombreux.
Le premier de ces problèmes, et non le moindre, est l’adoption d’une nouvelle constitution de la République gabonais. Pour cela, les choses semblent s’accélérer .Le collège électoral est convoqué le 16 novembre 2024, conformément à une décision prise en conseil de ministres le jeudi 17 octobre 2024. Ce qui voudrait dire que la campagne électorale proprement dite débutera dix (10) jours avant, soit exactement le 06 novembre 2024. Y a –t-il eu des pressions internationales pour que le calendrier s’accélère ainsi ? Cela est fort possible.
Tout ceci semble être très bien chronométré, conformément aux engagements pris par les auteurs du coup d’Etat militaire du 30 août 2023 de vite réinstaurer l’ordre constitutionnel normal, c’est-à-dire civil.
Cependant, quid de l’après adoption de la nouvelle constitution ? Quel sera l’ordre de l’organisation des élections qui vont suivre? Par quelle élection va-t-on commencer ? Quelles sont les instances qui les géreront et qui en garantiront la régularité et la légalité ?
Telle est la complexité d’une grande équation à plusieurs inconnues. Et malin sera celui qui pourrait la résoudre.
Apparemment, ces questions ne semblent préoccuper personne aujourd’hui. En tout cas, pas grand nombre d’acteurs politiques. La majorité ne focalisant son attention rien que sur l’élection présidentielle, sous-estimant ainsi la portée et l’importance des élections pour le renouvellement des conseils des collectivités locales et des membres des deux chambres du Parlement, dont dépendent en partie la mise en place d’une nouvelle Cour constitutionnelle.
A l’issue du vote référendaire d’adoption de la nouvelle loi fondamentale, il y a deux hypothèses qui se valent et dont aucune n’est à négliger.
Première hypothèse plausible, vu le contenu très querellé et tant décrié du projet de la nouvelle constitution, le « Non » l’emporte dans les urnes, et cela ne s’accompagne d’aucun nouveau coup de force.
Dans ce cas, et logiquement, il va falloir proroger la période transitoire, mettre en place de nouveaux organes de la transition régis par une nouvelle charte et déterminer combien de temps pourrait durer cette nouvelle période transitoire. Pourrait-il avoir, de nouveau, un autre dialogue entre forces vives du pays ? C’est ce que souhaitent déjà certains leaders d’opinion et acteurs politiques du pays, avant même le scrutin référendaire prévu le 16 novembre prochain.
Deuxième hypothèse aussi plausible que la première, vu la détermination des militaires à faire aboutir leur projet, en dépit de toutes les voix qui s’élèvent çà et là contre, c’est le « OUI » qui l’emporte.
Dans ce deuxième cas de figure, la transition prendra immédiatement fin, et c’en serait fini de la Charte qui régit toutes les institutions de la période transitoire. Ce qui revient à dire qu’il n’ y aurait plus cette charte elle-même, ni Parlement de transition, ni Cour constitutionnelle de transition, ni Conseil économique, social et environnemental de transition, ni gouvernement de transition et ni CTRI lui-même. A moins que l’on décide de faire fonctionner le pays avec deux textes fondamentaux, la Charte de la Transition et la nouvelle Constitution. Ce qui ne relèverait pas du bon sens et serait illogique.
Toujours est-il que dans ce cas, si c’est l’élection présidentielle qui est d’abord organisée, devant quelle juridiction compétente le chef de l’Etat élu serait-il investi et prêterait-il serment, puisque la Cour constitutionnelle de transition aurait disparu avec la fin de la transition ?
Qui désignerait, en dehors du chef de l’Etat fraichement élu, les membres de la nouvelle Cour constitutionnelle, étant donné que trois desdits membres devraient être désignés par un Parlement qui n’existerait pas encore, du fait que les élections législatives n’auraient pas encore eu lieu ?
Et quid du gouvernement qui pourrait être constitué, devant quelle assemblée serait-il responsable ?
Pour le moment, toutes ces questions ne semblent préoccuper grand monde. Surtout pas tous les opportunistes, flatteurs renards, cireurs de pompes, mercenaires politiques, profito-situannistes dont le seul souci est aujourd’hui d’apparaitre sur les écrans –radars du CTRI, en train de glorifier et de chanter des louanges au Général Brice Clotaire Oligui Nguema, le « messie », le rédempteur.
Et si on débutait le processus électoral par le renouvellement des conseils des collectivités locales, puis les législatives et enfin la présidentielle ?
Personne, par les temps qui courent, si non très peu, ne l’envisage, beaucoup ne lorgnant que les strapontins qu’ils convoitent après le scrutin présidentiel, après la victoire du candidat qu’ils ont déjà investi dans leurs esprits et pour lequel ils battent déjà campagne, confondant volontairement élection référendaire et scrutin présidentiel.
Et peu importe, pour eux, que le processus en cours débouche sur un blocage et une crise institutionnels plus grave encore.